Publié le 16 décembre 2025
Dans le débat budgétaire actuel, une évidence devrait s’imposer : sans stabilité fiscale, il n’y a ni confiance, ni investissement, ni croissance. La France change en permanence les règles du jeu, décourageant l’épargne productive et fragilisant les entreprises qui constituent la colonne vertébrale de notre économie. Cette instabilité chronique n’est plus tenable : elle pénalise nos PME, affaiblit notre attractivité et expose notre tissu productif à une concurrence internationale qui, elle, ne ralentit pas.
La situation est pourtant paradoxale. Les Français épargnent beaucoup, mais leur épargne est trop peu investie vers le financement de leurs projets de vie comme de nos entreprises. Et quand ils investissent, ils sont souvent découragés par une fiscalité qui figure parmi les plus élevées d’Europe – jusqu’à plus de 37 %, contre environ 26 % dans les pays comparables. Dans ces conditions, comment demander davantage de prise de risque aux épargnants ? Comment espérer renforcer les fonds propres de nos entreprises, financer nos transitions et soutenir notre tissu productif, en un mot affirmer notre souveraineté sur la durée ?
Les réformes portées par des mesures publiques volontaristes ont pourtant démontré leur efficacité : la mise en place du prélèvement forfaitaire unique (PFU) a amélioré la lisibilité de la fiscalité, augmenté les recettes de l’État et stimulé la création d’entreprises. Preuve que, lorsque la fiscalité s’inscrit dans la cohérence et la visibilité, les acteurs répondent présents. Mais la tentation revient chaque année d’ajouter, corriger, surcomplexifier. Cette instabilité est un poison lent : en alimentant l’incertitude, elle détourne l’épargne française de son rôle économique et érode encore davantage notre attractivité dans une compétition mondiale qui, elle, ne ralentit pas.
Ce manque de visibilité pèse d’abord sur les PME et les ETI. Alors même qu’elles sont l’un des maillons stratégiques de notre souveraineté, leur croissance est ralentie, voire stoppée, par manque de capitaux. Les fonds investis en valeurs PME cotées ont subi une décollecte massive ces dernières années, réduisant encore les ressources disponibles pour financer l’innovation et les transitions écologique et technologique. À force de penser la fiscalité à travers des critères trop restrictifs – souvent centrés sur les seules entreprises très jeunes ou innovantes – on oublie celles qui sont en phase de développement, qui recrutent, exportent et portent nos emplois industriels. Résultat : des entreprises moins valorisées, donc plus vulnérables aux rachats étrangers, et un tissu économique qui se rétrécit.
Il est temps de renverser la logique. La meilleure manière de redresser les finances publiques n’est pas d’empiler des taxes supplémentaires, mais de créer les conditions d’une croissance durable. Dans le rapport dette/PIB, la soutenabilité de la dette s’apprécie au regard du potentiel de croissance. Cela passe donc par un environnement fiscal stable, lisible et compétitif. Il faut sécuriser le PFU, renforcer l’attractivité des dispositifs d’épargne longue – PEA, PEA-PME, PER –, encourager la transmission de capital dès lors qu’elle soutient nos PME, et surtout simplifier les dispositifs pour qu’ils soient réellement utilisables.
Nous devons être lucides : la France ne peut plus se permettre de créer les propres conditions de sa fragilité. Dans un monde où les capitaux se déplacent à la vitesse de la confiance, chaque incertitude fiscale agit comme une invitation à investir ailleurs. Rendre à notre fiscalité cohérence et stabilité n’est pas un confort pour les investisseurs : c’est une condition de survie pour notre compétitivité et notre modèle social. C’est l’affaire de tous.
La France dispose d’un potentiel immense : une épargne abondante, des entreprises capables de devenir des champions mondiaux et des services financiers de premier plan. Pour transformer ce potentiel, replacer la stabilité fiscale au cœur de notre stratégie économique est prioritaire. S’il ne s’agit pas de notre seul levier, cette stabilité est l’un des moteurs essentiels dont dépend la capacité de nos PME à se développer, de nos épargnants à préparer leur avenir et de notre pays à retrouver, enfin, le chemin de la prospérité.